copie de la Danae de Klimt by Christiana Visentin Vendu


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L’attente se transforme en peinture : Danae de Klimt
(une femme dont la blessure dégorge de trésors)


Et c’était devenu un tableau. Un tableau que je devais lui faire, une histoire d’amour solitaire, une affaire entre moi et moi, pour lui, qui était déjà l’absence, qui redevenait ce qu’il avait toujours été : image de la beauté absente, ce silence à remplir, avec toute sa vie, et toute la vie qui était encore à vivre, qui devenait encore plus la vie, à cause de l’absence.
Une forme se composait et s’imposait. Il disait qu’il aimait Klimt, l’or et les rouges.
Cette toile devenait l’espoir, l’attente des choses douces, mais c’est drôle, elle prenait du temps, les choses douces ont besoin de temps.

Et ce fut un délire-délice que ce temps-là d’attente…me balader dans les rues, prendre le métro, entrer dans une épicerie, étaient quelque chose qui ressemblait aux premières expériences de la vie. Le même enthousiasme, la même vision pure de l’enfant. Par un choc de l’existence, mon cœur –délivré- venait réévaluer les choses de toujours et y découvrir l’absence de cynisme, de banalité.

Les jours passaient, les nuits. Elle devenait bouleversante de beauté. Elle avait soif de vivre. Mon rêve se colorait et se détachait de la nécessité de lui, de son corps. Je menais le jeu par la force de l’artificiel. Quelque chose de cruel me disait que c’est envoûtant de continuer par ce chemin-là. Ce rituel m’enflamme, il me semble avoir trouvée la bonne manière de le ‘saisir’ Lui, et de saisir en même temps Elle : la peinture. Bien sûr il y avait des moments durs, je me réveillais tétanisée de solitude le matin, mal en point, dans un état grippal, les bronches un peu glacés, le froid, avec la sensation coupante d’une glaciale réalité mais quelque chose était plus important que ces souffrances, continuait à me guider, un hallucinant jeux de reflets ouvrait ses portes à ma réalité la plus intime…où je vus, sentis mes yeux obsédés par des fenêtres, par des formes arrondies, je sus que je serai tombée en spirale, vers des vortex, vers des contrastes et des atmosphères sombres. Je sentis que j’aurais puisé du côté de l’enfance, les premières sensations…

1heure du matin. Les pièces d’or se détachent sur le voile et donnent de l’élégance, de la richesse et du contraste. Elle sera belle

Au petit matin, lorsque j’osais ouvrir un oeil au milieu d’un écroulement d’objets divers je ressentais confusément l’ « Existence Danae, » ma main se portait toujours sur mon ventre depuis, parfois les deux, je me « prends en main » comme si je prenais en main ma vie dans toute sa précarité mortelle, je devenais attentive à moi-même, me consolais. Les nuits où je dormais, je me surprenais aussi me caressant l’épaule, le cœur, la poitrine, le plexus, je me tenais, me donnais du courage. Mes mains, saisies d’une vie autonome, se mettaient à me chérir, à m’adoucir pour préparer le lendemain.

C’est ainsi qu’au fil des jours Danae se forma sous mes yeux, belle comme un nouveau né.

Danae portait avec elle un message d’abondance un message qui s’infiltra dans ma nouvelle peinture. Je me mis à peindre soudainement des nouveaux tableaux, les tableaux se suivaient, les toiles se coloraient presque toutes seules, à cause du travail continuel de la main mais aussi par la présence de ma nouvelle passion.

Quel coup de fouet divin :Tout ce qui m’avait semblé dur, insurmontable, ça ne l’était plus. Les difficultés, les retards, les tentations d’abandons, l’ennui, la paresse désespérée, tout semblait englouti dans un tourbillon d’or et de rouges, un mouvement inconnu. C’était L’Autre. Ce qui n’était enfin pas moi. Plus moi. Lutter détail par détail, avoir confiance en ce nouveau sentiment direct et empli de simplicité


La touche était plus émue, plus vibrante. Mais ce n’était pas assez, je sentais qu’il aurait fallu encore toute une vie, ma vie. Et que ma vie n’était peut-être pas assez. Combien d’heures avais-je encore à disposition pour que de ce grand maelström je puisse enfin remonter, heureuse ? Mon visage de somnambule, n’était pas chose oubliée. mes prunelles réapprenaient peu à peu la vue derrière mes paupières, en retrouvant cette image vraie, cette conscience de moi qui serait peut-être moi dès avant moi, dès le départ, il m’était plus facile désormais de fondre dans un autre, il m’était plus facile de servir cette force aimante qui se servait de moi comme d’une humble ouvrière, elle avait tant de choses à dire, tant de plans à assouvir, qu’une seule vie n’aurait pas suffi, et des milliers et de milliers de vies ne suffiraient non plus mais il fallait tout de même essayer.

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